La chasse

L'elfe regardait ses deux lames sans rien dire, passant et repassant son chiffon dessus, un sourire carnassier sur les lèvres. La guerrière avait toujours adoré les expéditions de Mortsure. Elle préparait donc ses affaires avec application. Hippocrate leur avait demandé de chasser les taurens qui avaient monté un camp près du Repaire. Une drôle d'idée en vérité... Venir s'installer si près de Mortsure... Ou peut-être les taurens pensaient-ils la communauté en sommeil ? Certes, ils avaient su se faire discrets, mais ils étaient tout sauf endormis !
Fourrant de nombreuses fioles dans sa besace, Lylywen finit d'ajuster ses bottes et de ranger ses armes dans leurs fourreaux. 
Elle sortit alors de la salle d'armes et passa dans les couloirs du Repaire en criant :

"Allez les gars, on y va, pas de temps à perdre !"

Depuis le temps qu'elle attendait ça ! Une sortie récréative ! Pas besoin d'étudier des parchemins pour s'infiltrer dans une quelconque citadelle et tenter de terrasser un de ces géants nauséabonds, non ! Du grand air, des ennemis à leur taille, et presque livrés à domicile !!

Jelana était trop jeune pour savoir pourquoi les taurens étaient les ennemis de l'Alliance, ni pourquoi ils avaient monter un camp dans cette lugubre forêt, juste là, mais qu'importe : les ennemis de mes amis etc...

Mais pour sa première "sortie nature" avec ses frères d'armes, elle voulait être parfaitement maître de son art, et était entrée en méditation intense, lévitant à quelques dizaines de centimètres du sol. C'était sans compter la finesse légendaire de la guerrière.

" - BLAM !"

Ça, c'était le bruit de la chute provoquée par le sursaut de la moniale.

Un rictus amusé et joyeux se lu sur les lèvres de l'homme deux fois en entendant le vacarme de Lylywen et la chute de Jelana.

Cela faisait si longtemps, on aurait pu les croire morts... enfin morts, disparus.
Mais le sang des mordus n'était pas éteint, loin de là...
Il en ressentait bien toute la discrète mais inégalable puissance, lui qu'ils appelaient Prince.

C'était comme le calme avant la tempête, quand tous les êtres vivants marquent un temps d'arrêt, conscients soudain d'un danger invisible, d'un danger immobile, d'un danger total.

Les squatters taurens allaient avoir une drôle de surprise !

Le prêtre caressa sa rousse barbe et ses intentions, d'une même main froide et déterminée.

Leeröy se mit à glousser à la vue de la chute de la moniale. On voyait bien qu'elle n'était pas une ancienne de MortSure et qu'elle ne connaissait pas encore le caractère bien trempé de Lylywen.


Le guerrier avait également décidé de participer à cette petite mission. Il s'ennuyait bien quelque temps au Repaire. Ses seules activités étaient de lire des bouquins sur l'herboristerie et ses diverses transformations. 


Il était, par exemple, à présent capable de créer un parchemin de téléportation mais pour deux bonnes raisons, jamais, il n'en créera aucun: il a horreur de la magie de toute sorte et, selon le livre, l'utilisateur de ce dit-parchemin n'a aucun moyen de savoir où il va atterrir. Avec la chance qu'il avait, le worgen serait encore capable se retrouver au beau milieu d'Orgrimmar.


Donc, un peu d'action ne pourrait lui faire que le plus grand bien.


En regardant son compagnon d'armes guerrière avec ses deux resplendissantes armes, Leeröy fit le choix de se munir de son bouclier. Connaissant l'elfe de la nuit, il faudra quelqu'un pour encaisser les coups à sa place pendant qu'elle massacre tout ce qui bouge...


Le guerrier se leva et prit la parole:


"Avant de partir, j'aimerais rappeler à chacun quelques consignes.

Tout d'abord, les informations obtenues sont assez vagues. Nous ne savons pas combien ils sont, quel est leur plan ou but et s'ils ont connaissance de notre guilde et repaire.

Ensuite, vous n'êtes pas sans savoir que non loin de ces lieux se situe Fossoyeuse, ce qui signifie que des renforts morts-vivants peuvent rappliquer. 

Et pour finir, ne tuez aucun innocent et aucune personne ne portant pas d'équipement de combat. 
Je sais ce que vous pensez: "S'ils sont de la Horde, pas de pitié!" Mais laissons ces êtres sans défense apporter un message fort à Orgrimmar..."

Après son discours, Leeröy empoigna son bouclier et prit la direction de l'entrée principale.

Lylywen grogna. Ne pas tuer d'innocents, non mais quelle idée saugrenue... Et puis un tauren innocent, ça n'existait pas. Leur laideur à elle seule constituait une raison de les massacrer. Elle offrit malgré tout un sourire à Leeroy, un sourire forcé, toutes dents dehors, le genre de sourire qui ne trompe personne. Se rendant compte de son ridicule, la guerrière éclata de rire. 


Allez, en route ! Tout le monde est là ? Vous avez pris une carte ? Parce que moi je veux bien taper, mais je ne suis pas douée en carte... 

Apercevant Hippocrate, Lylywen sourit de plus belle. Ils étaient là, ensemble, prêts à faire vivre leur communauté, coûte que coûte. 

Leeröy sortit du repaire tout en cherchant la carte de la Forêt des Pins argentés chiffonnée au fond de sa besace. 
Il la déplia avec bien du mal en essayant de ne pas la déchirer malgré ses bords usés et son état général assez pitoyable.
Le worgen posa la cartographie sur une pierre et demanda à chacun des aventuriers de venir autour de lui.


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"Ici, comme vous savez, c'est notre repaire *en pointant l'Ile de Fenris*
Selon nos sources, le campement des Taurens se trouve non loin de la Mine du Gouffre d'Elem, dans les montagnes avoisinantes. Cette position géographique est clairement en notre faveur, ce sera facile de s'y infiltrer. 

Si personne n'a de questions, nous pouvons y aller."

Admirative, Lylywen siffla en direction de Leeroy.

Et Bah, et bah, et bah, une carte et tout, c'est le grand luxe tout ça ! Faudra se méfier, le Moulin de l'Ambre n'est pas loin. Il ne faudrait pas avoir les yeux plus gros que le ventre. Et puis... les Taurens ont l'avantage de sentir la terre, la campagne, la nature... bien meilleurs que les morts-vivants...  !
Elle avait lancé cette dernière phrase tout bas, en lançant un  regard de biais à Leeroy.

Leeröy, dont certains sens étaient développés dus à sa "malédiction", répondit, agréablement surpris:


"Tu marques un point Lylywen. Les Taurens sont un peuple en harmonie avec la nature. Certains disent même qu'ils ont des prédispositions druidiques."

La guerrière serait-t-elle adoucie? Penserait-elle plus avec la tête qu'elle ne frappe avec? 


Avant de rejoindre le bord du lac entourant le repaire, il se retourna, préoccupé: 


"Sommes-nous uniquement 3 pour prendre part à cette aventure? Cela fait un peu léger pour combattre sans le moindre doute un nombre supérieur d'ennemis..."

Nous sommes quatre avec Jelana, de quoi faire des dégâts. Les autres nous rejoindront en route s'ils le souhaitent. Il est encore tôt, ça ronfle dans les étages... Ce qui veut dire que les taurens dorment probablement aussi. On attaque par surprise, ça vous va ? On fonce dans le tas, ou vous voulez les prendre par groupes de 3 ou 4 ? Tenez, j'ai pris quelques potions qui ne nous feront pas de mal. 

Lylywen fourra dans les mains de chacun une fiole contenant un liquide violacé. Regardant Hippocrate avec insistance, elle lui en donna deux de plus, mais vides celles-ci. 


Allez on y va !

La guerrière avait hurlé la dernière phrase, essayant de réveiller les quelques mordus qui pensaient pouvoir profiter d'une grasse matinée... 

"BLAM !"

Non, décidément, Jelana ne pourrait pas méditer avant l'assaut.

Un bruit se faisait entendre dans les couloirs, des tintements aigus ponctués de respirations difficiles sous fond d'un pas de course, et cela semblait se rapprocher de l’expédition prête a partir. Quelques secondes passèrent et l'on commencer a entendre une voix qui se détachait du vacarme : "Attendez, Attendez !" hurlait-elle ; et au détour de la salle on pu apercevoir Mordecaï, haletant, avec une énorme bécasse rassemblant un barda sans nom par-dessus son épaule gauche et son bâton dans l'autre main.
Le prêtre s’arrêta dans l'encadrement de la porte et posa une épaule contre afin de reprendre son souffle, un silence s'installa et on l’observait du coin de l’œil, comme s'il débarquait d'une autre dimension.

"L’expédition n'est pas encore partie j’espère ?" demanda-t-il, en se redressant, avec une respiration beaucoup plus aisée.

Mais non tu vois, il y a de la place pour tout le monde, viens !

Et la guerrière sourit en lui tendant une autre fiole pleine d'elixir...

Une voix familière retentit derrière nos aventuriers sur le départ :

"Te-te-te... Sérieusement?!? Vous pensiez réellement que vous alliez pouvoir vous passer de moi?!?

Han-han" fit Folten, le regard plus flavescent que jamais...

"J'en suis... et vous pouvez compter sur moi... les Taurens ne vont pas s'en remettre! Taurens... ou autres..." lâcha-t-il d'une manière faussement nonchalante et avec un rictus de dément au visage... un rictus qui _ véritablement _ faisait froid dans le dos...

***
**
*

La guerrière sourit en remettant à Folten ses fioles. Une pleine et deux vides, comme pour Hippocrate. 


Jelana ? Mordecaï ? Je ne vous connais pas bien, je ne sais pas trop comment vous vous comportez sur un champ de bataille... Vous avez compris la tactique ? 
*articulant chaque mot avec un ridicule dont elle n'avait pas conscience* 
ON-FON-CE-DANS-LE-TAS. Ok ?

Jelana avait salué d'un léger signe de la main les derniers arrivés.

La moniale au postérieur maintenant douloureux leva les yeux vers la guerrière. Des yeux desquels n'émanaient aucune sympathie.

"- Je vous conseille néanmoins de ne pas trop vous éloigner de nos soins. Enfin c'n'est que mon avis... quel est votre nom déjà ?"

Lylywen. Plutôt que de ne pas m'éloigner, je propose que tu te rapproches le plus possible de nous, on te protégera sans souci. 

Bon en revanche si on veut avoir une chance d'arriver avant le lever du soleil, faut y'aller !

Leeröy, sur les dernières paroles de Lylywen, scruta le ciel. La nuit s'écoulait pendant que les aventuriers discutaient. 
Il était grand temps de partir. Certaines nouvelles recrues n'étaient pas au courant du secret si bien gardé de MortSure. Il ne fallait pas qu'ils le découvrent de cette manière. 
Le worgen espérait qu'aucun débordement ne se produise et se remémora l'incident en Pandarie...


"Maintenant que nos retardataires sont arrivés, le groupe semble complet. Nous pouvons y aller."

Leeröy, le bouclier fermement tenu dans sa main gauche et son arme courte dans l'autre, prit la tête du groupe. Il était comme le gardien, le protecteur, le "preneur de coups".


L'équipe traversa le lac à bord d'une petite barque n'inspirant pas confiance, cachée par un voile brumeux qui se déposait toutes les nuits sur la zone entourant le château comme si la nature elle-même avait décidé de dissimuler le repaire.


Arrivé sur l'autre rive, le groupe longea le lac en direction du Sud. Après avoir gravi la montagne, tout en se dirigeant vers la mine du Gouffre d'Elem, Leeröy fit signe aux autres de s'arrêter. 
Il avait entendu du bruit et plus exactement des mots, deux voix distinctes. Il se concentra, faisant usage de son ouïe améliorée et entendit un dialecte reconnaissable entre tous: le Taurahe, la langue des Taurens. 


Il se retourna, le sourire aux lèvres: 


"Les Taurens se trouvent juste à coté, aux abords de la mine. Je pense même que leur campement se situe exactement dans la mine. De ce que j'ai pu entendre, il y en a deux à quelques mètres. Un volontaire plus discret que moi et mon armure en plaque pour confirmer?"

Comment ça pas en armure en plaque ? La guerrière grogna de dépit. Elle les avait sentis, tout proche, à portée de main, à portée de dents... Il lui fallu beaucoup de concentration pour ne pas fausser compagnie à ses camarades et attendre la confirmation. Oui, Leeroy avait raison, il fallait mener cette mission à bien, mais dans les règles. Elle avait pris soin de se nourrir avant de partir, elle pouvait donc aisément patienter.
Son regard se planta dans celui de Jelana. 

Les moines peuvent se déplacer discrètement non ?

Le silence qui suivit la question de la guerrière parut interminable... C’était gênant, beaucoup trop gênant pour le prêtre qui leva fébrilement la main avant de prendre la parole :


Moi...Moi, je peux le faire !

Sans vraiment attendre de réponse, Morthon s’éloigna du groupe en éclaireur. A quelques mètres se tenaient 2 Taurens, gardant l’entrée de la mine, tous les deux vêtus d'une armure de plaque et armés d'une épée et d'un bouclier. Seulement, il nota aussi la présence d'un petit campement composé de 3 tentes juste a coté, il se pourrait qu'ils soient plus nombreux que prévu.
Son travail terminé le prêtre s'empressa de rejoindre son groupe et leur fit un rapport détaillé de la situation.

La guerrière n'avait pas eu le temps de dire "ouf" que le prêtre était parti. Risqué, mais efficace puisqu'il revint peu après avec des informations fiables, pour changer !


Parfait. Séparons-nous alors, Leeroy et moi pouvons aisément nous occuper des deux plaqueux rapidement pendant que vous avancez vers les tentes. Soyez discrets, soyez rapides, soyez efficaces. 
Prêts ?

"Ça va être simple de nous protéger si on se sépare, tiens" pensa la moniale, soupirant légèrement. Elle se contenta de lancer :

- J'imagine que Folten sera parfait pour vous accompagner, permettant à Leeroy d'encaisser les assauts de ceux qu'on ne manquera pas de réveiller dans les tentes.

Ah oui bonne idée ! Je ne suis pas très stratégie en fait pour tout avouer... J'ai plus appris à foncer qu'autre chose. 

C'est Jelanu toi c'est ça ?

La guerrière semblait vexée pour écorcher volontairement le nom de Jelana qu'elle avait prononcé quelques instants auparavant. La moniale articula :

- Je-la-na.

Elle afficha un sourire largement exagéré.